Page en cours

Histoire de Fontaine la Sorêt


 Fontaine-la-Soret recèle une histoire ancienne qui mérite de nous être contée…
Au XIXème siècle, plusieurs archéologues de notre région ont réalisé un travail de mémoire qu’il nous appartient de conserver et transmettre. Citons, entre autres, M. Le Prevost, archéologue et historien  bernayen (1787-1859), et M Ch.Lenormant (1802-1859) archéologue, habitant de Fontaine-la-Soret.

Savez-vous où se trouve la chapelle St-Eloi-de-Nassandres ?
Essayons d’y arriver en suivant les indications de M de Toulmon, organisateur d’une excursion archéologique à Bernay et ses environs en 1864 :
« …A la Rivière-Thibouville, nous descendons de voiture pour continuer à pied. Le chemin, belle grande route bordée de peupliers, se poursuit en ligne droite. Parmi les dernières maisons du village, nous apercevons celle de M. Loisel … A droite et à gauche de la route s’étendent des prairies en contre-bas… Nous passons devant le château de M. le comte d’Epremesnil…puis nous traversons un long espace recouvert de craie qui deviendra le sol de la future gare de la Rivière-Thibouville sur le chemin de fer de Rouen…De là, nous prenons  à gauche, une jolie sente tout ombreuse, verte de haies, qui contourne la base d’un coteau boisé. Après l’avoir suivi un certain temps, nous arrivons à une cour plantée de pommiers, sous lesquels  se cache le prieuré de St Lambert de Malassis, aujourd’hui connu sous le modeste nom de chapelle de St-Eloi-de-Nassandres.…»

 Vous avez trouvé ?
  Alors commençons notre visite par les indications du guide d’Adolphe Joanne en 1872 :

« Cette chapelle se compose d’une nef longue d’environ 6 mètres et d’une abside en cul de four.
Une petite fontaine qui sort de terre sous la chapelle coule dans un réservoir de forme carrée recouvert par une voûte romane et où l’on descend par des marches.
Vis à vis de la chapelle Saint-Éloi se voit une petite construction romane englobée dans une maison du XVIème siècle où habitèrent Chateaubriand et Mme Récamier. »
 C’est au  XIIème siècle que cette chapelle dédiée à Saint Lambert fût érigée.
En 1126, Guillaume de Tibouville  la donna à l’abbaye du BEC ainsi que divers biens, dont son moulin de Malassis,  mais à la condition que l’abbaye y  fonde un prieuré.
Le prieuré de saint Lambert est mentionné dans le registre d’Eudes Rigaud, à l’occasion d’un moine atteint de la lèpre et qui devait être envoyé « ad locum Sancti Lamberti » (au lieu St Lambert).
Nous trouvons dans le pouillé du diocèse de Lisieux (dénombrement de tous les bénéfices ecclésiastiques situés dans un domaine géographique), datant du XVIème siècle, la mention de la léproserie de Fontaine-la-Soret : « Leprosia de FontibusSorelle ». Cette léproserie n'est autre que le prieuré de St-Lambert-de-Malassis, devenu par la suite St-Eloi-de Nassandre.
Pour une description détaillée de la chapelle, voir référence en bas d’article.

Fontaine-la-Soret : découverte d’un cimetière mérovingien en 1854.
 Cette découverte fit sensation dans les milieux archéologiques de l’époque…
Qui mieux que son découvreur, Charles Lenormant, pourrait nous en dire plus, suivons-le dans son exposé devant les cinq académies de l’Institut en ce 25 octobre 1854 :
 « Ce qui m’est arrivé récemment, et dans des circonstances vraiment extraordinaires doit être relaté. J’ai passé, pendant dix-neuf ans, avec la plus complète indifférence, aux lieux (Fontaine-la-Soret) où une bonne fortune inattendue a multiplié, en peu de jours, les révélations les plus curieuses…
La Chapelle-Saint-Eloi, théâtre de cette découverte, est un ancien prieuré de l'abbaye du Bec…situé dans la commune de Fontaine-la-Sorel, canton de Beaumont-le Roger. J'étais loin de me douter qu’un jour des monuments, comme on n’en trouve pas beaucoup en un siècle m’attendraient complaisamment, au milieu des champs…
Qui a entendu parler de la Chapelle-Saint-Eloi, et même du prieuré de Saint-Lambert-de-Nassandres ou de Malassis, dont le nom se perdit, il y a deux cents ans peut-être… Un savant dont le nom fait autorité dans les études provinciales, notre confrère M. Auguste le Prévost, avait signalé, à une faible distance du point oublié que j’habite, les restes d’une villa romaine décorée avec une rare magnificence. Cette résidence, fondée  au confluent de la Charentonne et de la Risle, à portée de la voie romaine qui conduisait de Lutèce à Juliobona  (Lillebonne), entre Evreux et le Noviomagus auquel Lisieux a succédé, faisait face à un camp romain…
Avant d’en venir à notre découverte, en voici les circonstances :
Un pauvre et honnête paysan de mon plus propre voisinage décida de construire une chaumière à quelques centaines de pas de la chapelle St Eloi. L’idée lui vint, avant de savoir s’il aura les ressources nécessaires pour accomplir son projet, de tracer le plan de la nouvelle construction. A cet endroit, la côte est abrupte et la pente à peine adoucie par des éboulements d’ancienne date.
Il faut dégager le terrain.
La tranchée qu’il creuse découvre alors les assises d’un édifice dont aucun indice n’avait fait soupçonner l’existence. Le rustique architecte n’y voit qu’une carrière, et, arrachant jusqu’au dernier moellon, il fait un monceau des matériaux de sa future façade.
 Tel est l’état dans lequel nous avons trouvé le tas de pierres dans lequel mon fils de 17 ans distingua  les restes d’un monument romain.
Nous avons trouvé, dans un étroit espace et presque toujours à fleur de terre, la tête et les fragments d’une statue antique, les débris d’une colonne monumentale  servant à supporter la statue, les pierres chargées d’inscriptions d’un baptistère chrétien bâti avec les ruines du monument romain qu’il avait remplacé  et, sur le terrain d’un cimetière attenant, de nombreuses épitaphes, presque  toutes tracées sur des tuiles à rebord…
…C’est un Romain, soldat de Marc-Aurèle appelé Serquinius  (et qui laissa son nom au village de Serquigny) qui éleva le monument dont nous avons trouvé les débris. Cette colonne, placée sans doute au centre d’une exèdre (salle de conversation) portait une inscription  attestant que le monument était dédié à Hercule Mercure, divinité romaine… ce qui place l’époque présumée de cette dédicace aux environs de l’année 210 de notre ère...
 Taurinus, Saint Taurin premier évêque d’Evreux, détruisit ce  monument pour le remplacer par le baptistère dont nous avons reconnu  les débris...
Au nombre des inscriptions retrouvée, il s’en trouve une datée du  Vème siècle de notre ère, et qui démontre que le lieu du martyre de saint Taurin, Gisacus,  était en fait l’emplacement même de notre découverte à Fontaine la Soret….
Après être entrés dans le baptistère de saint Taurin, et l’avoir reconstruit en imagination tel qu’il existait, nous nous trouvons entourés des plus vieux et des plus vénérables souvenirs du christianisme. Notre attention est d’abord attirée par les inscriptions monumentales dont on l’avait décoré… Sur la face extérieure figurait  l’inscription souvent répétée à cette époque : « que la paix soit avec ceux qui entrent dans cette enceinte ». Au fond du baptistère on lisait: « ô Christ-esprit, exaucez notre prière »; et au-dessus étaient gravés les emblèmes des premiers siècles: la colombe, le vase eucharistique et le chrisme (symbole chrétien formé du X et du P) formant une croix …
L’impression causée par ces objets, qui nous reportent au Vème siècle, s’accroît encore à l’examen des fragments de vases qu’on recueille au milieu des décombres. Nous y retrouvons en effet presque tout le symbolisme des catacombes, la croix grecque, les différentes formes du monogramme de Jésus-Christ, le mystérieux poisson, la palme, avec les acclamations signalées par les explorateurs de la Rome souterraine : « bois, et tu vivras », formule grecque écrite en lettres latines et qui fait allusion au sacrement de l’Eucharistie : « vis en Dieu », tracé avec tant d’élégance sur un vase rouge…
…Figurent aussi des  dates du VIème siècle, règne des monarques Mérovingiens… il y en a de Childebert Ier et d'un Clotaire. En même temps nous voyons arriver des noms d'origine barbare…
Mais ce qui devait à juste titre exciter notre attention, c'est la trace laissée par des personnages qui appartiennent à l’histoire. On lit sur les pierres de notre baptistère le nom du fils et successeur de Clovis, Childebert Ier, et de saint Germain d’Autun, évêque de Paris… qui écrivit de sa main « moi Germain, je suis venu ici l'an 46 du règne de Childebert », soit  557 de notre ère…
 M. le Prévost, notre savant confrère, me rappelle à propos que Childebert Ier possédait dans notre voisinage plusieurs palais qu’il devait souvent habiter...
A côté du monogramme de Childebert 1er et de l’inscription de saint Germain, on lit un troisième nom : Clodoald qui offre une particularité inattendue : il est conçu dans un caractère qui n'est ni latin, ni grec, mais en lettres runiques, et ce n'est pas le seul exemple que nous ayons trouvé…
Les noms tracés sur nos épitaphes runiques sont ceux qu’on rencontre dans l’antique épopée germanique ou dans la famille des Mérovingiens … ». 

  Origines des informations:
-          Mémoires et Note de M. Auguste LE PREVOST, publié par MM Léopold Delisle et Louis Passy, sous les hospices du conseil général et de la société libre d’agriculture sciences arts et belles lettres de l’Eure, tome 2, octobre 1864.
-          Bulletin Monumental, collection de mémoires  et de renseignements sur la statistique monumentale de la France, publié par M de Caumont, Paris 1864: Excursion archéologique à SAINT ÉLOI DE NASSANDRES, par M. de Toulmon, membre de la Société française d’ archéologie.  (avec description détaillée de la chapelle)
l’Athenaeum français 1854, Société Savantes, Institut de France, Académie des Inscriptions et Belles Lettres, Séance du 29 septembre 1854.

chapelle Saint Eloi Fontaine la Sorêt.JPG

Eglise saint Martin de Fontaine la Sorêt

L'église Saint Martin se situe en contre-haut du bourg de Fontaine la Sorêt. Entourée de son enclos paroissial, au voisinage d'un château du 18eme siècle et de son parc, inscrits au titre des Monuments historiques. D'un volume unique dans lequel se succèdent une nef et un chœur à chevet plat, la tour du clocher datant du XIème siècle vient s'imbriquer dans l'élévation sud du chœur. Des murs en moellons irréguliers pour partie, des pierres de taille mais également un ensemble de pierres et de silex noirs taillés, disposés en damiers réguliers pour le chœur, caractérisent cet édifice. Au fil des siècles, de nombreuses modifications et des ajouts ont façonné ce monument qui est classé Monument historique depuis 1846.
Grâce aux dons par la fondation du patrimoine et des subventions, au terme de 18 mois de travaux en 2021 et 2022, la restauration de la tour clocher et la couverture du clocher en essentes de chênes (auparavant en essentes de châtaignier) , a donné un resultat esthétique remarquable.
A l'interieur, des oeuvres d'art et du mobilier sont protégés en tant que monuments historiques.
Les habitants de Nassandres sur Risle peuvent continuer à célébrer des offices religieux, ainsi que d’accueillir des concerts de chorales et de groupes musicaux.

Ci-dessous les photos avant et après rénovation.

Eglise Saint Martin de Fontaine la Sorêt.jpg
IMG_20220615_144404-redimensionné.jpg

Publications